L’ORATOIRE DE NOTRE-DAME DU CHÊNE DANS LA FORÊT COMMUNALE
D’ANGEVILLERS.
Texte : Norbert GUELEN
Photos : Alain DEDENON - Roland KESSELER

L’origine de la légende date probablement d’une période antérieure à la guerre de trente ans (1618-1648).
Elle raconte l’histoire d’un jeune homme de FONTOY revenant d’ŒUTRANGE où il était allé voir sa bien-aimée. Surpris par l’orage en pleine forêt à la limite des localités d’ANGEVILLERS et d’ŒUTRANGE, il vit à quelque distance un chêne foudroyé par l’éclair. Il se mit à prier et fit le vœu de placer dans le tronc de celui-ci une statue de la Vierge Marie s’il s’en sortait vivant...ce qu’il fit pour remercier le ciel d’avoir été épargné.
A partir de ce moment, ce lieu-dit KREUZ-EICH ou KRAÏZ’ EECH¹ devint un endroit de dévotion populaire ; l’arbre christianisé vit accourir une foule de pèlerins jusqu’à l’incendie de 1909 provoqué par une bougie. Les habitants d’ANGEVILLERS et des alentours se cotisèrent pour ériger un monument en pierre ; sa réalisation fut confiée en 1910 à un artisan maçon du village JOSEPH HOFFMANN (1877-1959).
Cet édicule religieux en pierres calcaires jaunes, surmonté d’une croix ressemble à une petite chapelle ; il est recouvert d’une toiture à double pans de bardeaux ; son tympan porte l’inscription « A.D.1910. » signifiant ANNO DOMINI... « en l’an du seigneur » en d’autres termes 1910 après Jésus Christ.

Une niche bordée de colonnes et fermée par une grille en fer forgé abrite une statuette de la Vierge à l’enfant polychrome ceinte de chapelets ; à ses pieds, veillent des angelots.

Elle repose sur un socle volumineux à décor sculpté (croix et arcature en en plein-cintre) dont le centre est occupé par une plaque de marbre rectangulaire portant l’inscription « REGINA MARTYRUM SALVEI » ; sa traduction est « Reine tu as sauvé le martyr » mais il convient toutefois de comprendre « martyr » dans le sens de témoin. Deux supports à bougies en fer se dressent de part et d’autre du monument restauré en 1980.

A la droite de l’oratoire, une croix a été plantée il y a quelques décennies par les enfants de chœur de la paroisse lors de la procession du 15 août, jour de l’Assomption². Restaurée plusieurs fois, son sommet porte le titulus avec l’inscription I.N.R.I.³ (Jésus de Nazareth roi des Juifs).
Pendant les deux dernières guerres mondiales, des cierges brûlaient en permanence au pied de la statue toujours fleurie ; les habitants priaient pour le retour des hommes et l’arrêt du conflit.
De nos jours, à l’initiative du conseil de fabrique4 (voir le droit local5), les paroissiens d’ANGEVILLERS et des villages voisins se retrouvent le 15 août, jour de la fête de Marie (Assomption) pour égrener le chapelet, chanter, prier, partager un moment de recueillement puis de convivialité autour d’un gâteau et d’une boisson.
Invisible des sentiers, ce havre de paix est blotti en bordure du bois et d’une petite clairière ; entretenu par des bénévoles, il est souvent fréquenté ; fleurs et bougies y sont déposées régulièrement. Quatre bancs permettent aux marcheurs de « souffler »… voire de méditer…

NOTES :
1) - KREUZ-EICH ou KRAÏZ’EECH : la croix du chêne. Parler usité par les autochtones.
2) - ASSOMPTION : élévation de la Sainte Vierge dans le ciel ; elle a été exemptée du tombeau par son assomption, privilège qu’elle est seule à partager avec Jésus ( ASCENSION = élévation de Jésus dans le ciel sur le mont des oliviers quarante jours après Pâques dans les actes des apôtres de St Luc).
3) - I.N.R.I. : les quatre lettres initiales des mots latins Iesus Nazarenus Rex Iudaeorum c’est-à-dire « Jésus de Nazareth Roi des Juifs » (dans certains ouvrages on peut trouver « Jésus le Nazaréen, roi des Judéens ») que Ponce Pilate avait fait mettre sur la croix. Le titulus (écriteau) indique le motif de la condamnation de Jésus comme c’était la règle chez les Romains.
4) - LE CONSEIL DE FABRIQUE : les fabriques créées par un décret de 1809 modifié par trois décrets de 1992, 1997, 2001 sont des établissements publics chargés de l’administration matérielle des paroisses catholiques. Les conseillers sont nommés conjointement par l’évêque et le préfet pour une durée de trois ans (neuf dans les paroisses de plus de cinq mille habitants, cinq dans celles de moins de cinq mille habitants). Maire et curé sont membres de droit.
5) - DROIT LOCAL : hérité de l’annexion allemande en ALSACE-MOSELLE (ELSAß-LOTHRINGEN). En 1905 = séparation de l’église et de l’état = donc suppression des fabriques en FRANCE.
SOURCES :
- Le site de la commune d’ANGEVILLERS sur INTERNET.
- Le Républicain Lorrain : articles des 20-08-2010, 17-08-2012, 20-08-2016, 13-08-2017, 13-08-2022.
- Livret sur le circuit de découverte du patrimoine angevillois (60e anniversaire de l’église 17-24 juin 2007)
- Compte-rendu de la visite d’ANGEVILLERS du 7 juillet 2012. Mélanie LEROY, chargée de mission
inventaire du patrimoine et activités – Communauté d’agglomération. Portes de France – THIONVILLE.
- Le guide du droit local. Le droit applicable en Alsace – Moselle de A à Z, sous la direction de Jean-Luc VALLENS secrétaire général de l’Institut du Droit Local (I.D.L.) Economica 1997.
- Dictionnaire culturel de la Bible. Cerf-Nathan-1990